samedi 9 juillet 2011

La chèvre


Imaginer la suite de cette phrase :

« Une cloche tinta. On aurait dit une chèvre qui gambadait, une chèvre qui aurait eu une cloche au cou, naturellement. »

L'exercice est simple, ou du moins il y paraît...


Une cloche tinta. On aurait dit une chèvre qui gambadait, une chèvre qui aurait eu une cloche au cou, naturellement.

Pour y avoir déjà pensé, il me semble que j'aurais aimé être une chèvre. A condition, bien sûr, d'avoir conscience de mon existence de chèvre.

Tout petit déjà, je rêvais de grands espaces. De collines et de rivières, de terre, d'herbe, et de rocaille. La nature et le grand air me donnaient des ailes. Et puis, surtout, je savais m'ennuyer. Je possédais donc la qualité essentielle pour mener une vie de chèvre trépidante. Parce que les vies de chèvres PEUVENT être trépidantes. Ou tout au moins, c'est à cela qu'aspire n'importe quelle chèvre qui se respecte : l'aventure. Monsieur Seguin me l'a appris; j'avais quatre ans.

Aujourd'hui, l'aventure, la nature, tout cela était bien loin.
Agent d'entretien dans un grand magasin, il faut avouer que c'est un travail assez ennuyeux. Et répétitif. Et la dimension d'espace, excepté dans l'intitulé « grand magasin », je ne la retrouvais nulle part. Pas même une fenêtre pour m'évader...


Il fallait me rendre à l'évidence : si ma vie de chèvre promettais d'être réussie, ma vie d'humain était, à l'inverse des étendues vallonnées qui me faisaient rêver, particulièrement plate et sans résonance... Cette cloche qui continuait de tinter derrière moi, sur cette immense place noire de monde, était là pour me le rappeler.

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